La tribune du jour
Parcoursup : « une arme de sélection massive » selon l’intersyndicale de l’Université d’Angers
En tant qu’organisations syndicales, nous ne pensons pas que l’essentiel puisse se résumer à des batailles de chiffres. Mais nous devons réagir après la présentation qui est faite par le ministère mais aussi par l’Université d’Angers des premiers « résultats » de Parcoursup. Voir ce 24 mai, en « une » d’un quotidien angevin, que 76% des 21.000 candidatures à l’UA auraient été agréées nous interpelle. On apprend en effet à la page suivante qu’il s’agit de 76% des candidatures locales et non de toutes les candidatures déposées. Faut-il jouer sur les nombres comme on joue sur les mots ? En réalité, sur la base des chiffres donnés par le quotidien, 9385 réponses positives rapportées à 21.000 font plutôt 45%. On obtient 44% de mise en attente (9240) et donc 11% de « non ». C’est encore moins reluisant qu’au niveau national (oui : 53,5% ; en attente : 43% ; non : 3,5%) et bien pire qu’avec APB l’an dernier à la même époque. Certes, d’autres filières sont comptabilisées au niveau national (BTS notamment) et les chiffres mélangent allègrement filières sélectives et non sélectives, mais ils n’indiquent en rien, bien au contraire, que le début de Parcoursup se passe « sans accroc » à l’Université d’Angers et ailleurs. Les lycéen.ne.s « en attente » ou refusés partout, placés en grave situation de stress à la veille du Bac, le découvrent à leur dépens.
Nos organisations syndicales sont attachées aux diplômes nationaux ouvrant des droits collectifs, et en premier lieu au Baccalauréat. Elles ont donc, de longue date, dénoncé les logiques de tri social qui se profilaient déjà dans le système APB et se consolident ouvertement dans Parcoursup, ce dernier remettant en cause le Bac comme premier diplôme universitaire ouvrant le droit de suivre des études supérieures de son choix.
L’algorithme Parcoursup dévoile notamment sa nature parce qu’il ne demande pas aux lycéen.ne.s de classer leurs vœux de poursuite d’études. Aujourd’hui, celles et ceux qui ont reçu des réponses positives dans des filières non véritablement souhaitées sont sommés de les accepter ou de les décliner en l’espace de quelques jours. Dire « oui », c’est perdre tout espoir d’obtenir la filière de son choix où on est mis « en attente », à moins de maintenir expressément ses vœux. Dire « non » (et « libérer » sa place pour les suivants « en attente »), c’est prendre le risque de ne rien obtenir ensuite. Nul doute que cela poussera bien des jeunes –en particulier celles et ceux issus des classes populaires qui ne disposent pas de réseaux susceptibles de bien les conseiller- à accepter ce qui n’est qu’un deuxième choix ou à se décourager. Et c’est d’ailleurs là le véritable objectif du gouvernement : décourager les jeunes de poursuivre des études supérieures afin de pouvoir continuer à refuser aux universités les moyens nécessaires à l’accueil des nouvelles générations.
C’est pourquoi, au-delà des batailles de chiffres, nous dénonçons Parcoursup comme une arme de sélection massive, où le mot « sélection » doit être compris comme une sélection sociale. Nous continuons à revendiquer l’abrogation de la loi ORE. Nous exigeons des moyens financiers pour que les universités puissent accueillir les nouvelles générations avec les moyens humains et pédagogiques adéquats. Nous appelons toutes et tous à se mobiliser en ce sens.
L’intersyndicale CGT, FO, FSU, Solidaires et UNEF de l’Université d’Angers.