Angers
L’Orchestre Poly-Rythmo de Cotonou au Chabada à Angers le 26 Avril
L’Orchestre Poly-Rythmo de Cotonou débarque le mardi 26 Avril au Chabada d’Angers
Le dimanche à Cotonou est un jour de mariage sonore. Dans la capitale économique béninoise, les messes et les promesses s’échangent avec la bénédiction des couvents vaudous.
Au Bénin, comme chez les cousins haïtiens, de la Santeria cubaine ou du Candomblé brésilien, les affaires de culte restent perméables et visibles. Un trésor restait pourtant caché à Cotonou. Le Tout Puissant Orchestre Poly Rythmo qui marie depuis les années 60 et 70 funk, soul, ou afrobeat, avec les rythmiques vaudoues issues de cette petite langue de terre chargée d’esprits.
Après avoir accompagné les plus grands (Manu Dibango, Myriam Makeba, Angelique Kidjo,FELA, Bembeya Jazz, Tidiani Koné, Gnonnas Pedro, …), l’orchestre goûte aujourd’hui aux délices d’un buzz occidental, qui rend hommage à sa pléthorique discographie, qui avait jadis tapé dans l’oreille de Fela lui-même.
La perspicacité de quelques collectionneurs de vinyles et autres aficionados de soul africaine a suffi à redonner une aura internationale à une infime partie de leur patrimoine que l’on estime à plus de 500 morceaux. Il y eut d’abord le label américain LuakaBop de David Byrne, qui piocha un titre de cet orchestre magique au son distordu, avant d’être suivi par les anglais Soundway, et enfin le label allemand Analog Africa.
Et si aujourd’hui, les vinyles collectors de ces papis afro-funky s’arrachent sur internet pour des centaines d’euros, c’est bien parce que ces vétérans firent la renommée des nuits africaines au Canne à Sucre, au Zénith ou sur la scène du cinéma Vogue. Durant les jeunes années du Bénin indépendant, le groupe donnait de la voix pour soutenir le « patriotisme cru » du régime marxiste, en admettant toutefois fréquenter plus les œuvres de James Brown, de Dalida ou de Johnny Hallyday que celles de Marx et Lénine. Véritable gloire nationale entre 72 et 90 sous le règne du président Kérékou, dont la politique fut taxée de « laxismebéninisme », le Poly Rythmo s’exportait alors dans toute la région.
« On écoutait de tout, variété française, congolaise, cubaine, du funk, de la soul et même de la musique arabophone puisque lorsqu’il y avait une visite officielle d’un pays arabe au Bénin, il fallait jouait le répertoire de leur terroir. Même Sékou Touré, le président guinéen, avait été surpris de voir comment on reprenait les tubes de son Bembeya Jazz national !», rappelle Bentho Gustave, le bassiste.
« On adorait ce mélange de rythmes africains bien dansants qu’on connaît puisque le Bénin est à un carrefour culturel » poursuit Mélomé Clément l’éternel leader du groupe. Même si le chef de l’Orchestre Poly Rythmo préfère déormais l’église aux cérémonies occultes, il concède tout de même un emprunt aux rythmiques ancestrales vaudoues pour des bienfaits
musicaux. « Si notre musique marie des rythmes comme le Sato, qui est le nom d’un grand tambour et aussi d’un rythme joué en hommage aux morts, c’est juste parce que mélangé avec des guitares, des cuivres et un clavier, il s’accorde bien avec le funk !». En bon pratiquant qui chante de la chorale, Mélomé Clément préfère éviter de trop détailler les relations du groupe avec le monde des invisibles, dont les rythmiques interdites par les missionnaires européens puis par le régime marxiste de Kérékou, ont pourtant survécu dans l’ombre des « couvents ».
Serait-ce ce secret bien gardé qui donne sa toute puissance à l’Orchestre Poly Rythmo, capable de transformer un rythme sakpata dédié à la divinité de la terre, de la variole et des maladies contagieuses, en un groove aussi infectieux qu’il donnerait des maux de tête au Pape James Brown? Alors, bénie soit la fièvre de ce mariage vaudou-funk béninois