Angers
Le 8 mai journée commémorative à Angers
Dimanche matin à Angers, on célébrait la 66e commémoration de la victoire des Alliés sur le nazisme et le fascisme place Leclerc.
Passage des troupes en revue sous le soleil par le général de division Jean-Marc Ripoll et le dépôt de gerbes par les officiels présents, les enfants de six écoles et deux collèges d’Angers ont chanté la Marseillaise. Puis deux Transall dont la Ville d’Angers est la marraine ont survolé la place. Une cérémonie sous le soleil.
Le 8 mai journée commémorative
La fin de la guerre est vécue en 1945 dans une liesse populaire forte, différente de celle du 11 novembre 1918. Le 8 mai 1945, les populations sont préparées à la fin du conflit dans une grande partie des Etats européens progressivement libérés par les Alliés Occidentaux et Soviétiques. Elles ont été libérées de la présence allemande (en France dès la fin de l’année 1944, mises à part les poches atlantiques), elles suivent la progression des armées alliées au fil des lectures de journaux et d’informations radiodiffusées, des nouvelles d’un front mobile dans un territoire sous domination allemande qui se réduit comme peau de chagrin.
Il semble évident de célébrer la date dès son origine : le 8 et le 9 mai 1945 sont fériés en France pour permettre à la population de vivre l’événement dans une démarche collective moins perturbée que la Libération de l’été 1944 marquée par des formes d’épuration sauvage. Les rassemblements sur les Champs Elysées par exemple avec le passage à l’Arc de Triomphe du général de Gaulle ont bien cette dimension festive.
Cependant la mémoire collective est ici confrontée à un processus d’éclatement lié à la diversité des façons dont le conflit a été traversé. Quel unanimisme créer parmi des populations encore en attente de retours : prisonniers, déportés raciaux, déportés politiques, déportés du STO ?
Après 1946, le chemin fut long vers la journée fériée. La célébration du 8 mai 1945 a considérablement changé. Annoncée par le général de Gaulle à la radio, soutenue par les cloches, la paix est bien fêtée le 8 mai 1945, puis le 9 mai lors de grandes manifestations publiques. Les commémorations de la Grande Guerre tenant encore une place principale dans l’univers mémoriel français, le 11 novembre 1945 a donné lieu à des cérémonies importantes. La ville d’Orléans a fêté dans un même élan le 8 mai 1945 la fin de la guerre et la libération de la ville par Jeanne d’Arc en 1429. La concurrence de Jeanne reparaît chaque année car à partir de 1946, le 8 mai est fêté le dimanche s’il y a coïncidence de dates ou bien le dimanche suivant qui est aussi celui de la fête de la Sainte.
L’argument de la reconstruction qu’il ne faut pas ralentir par un jour férié supplémentaire est aussi avancé. En 1948, le ministre des anciens combattants, François Mitterrand confirme le caractère non férié du 8 mai.
En 1951, les autorités nationales commémorent alors que le 8 mai n’est pas un dimanche. Cependant la guerre 1939-1945 est féconde en dates à commémorer. Des groupes identifiés par leur rapport à la guerre organisent leur mémoire du conflit : pour les résistants de la France libre, le général de Gaulle en tête, le 18 juin est commémoré de façon systématique, d’autant plus que cette mémoire se donne également un lieu propre, le Mont Valérien, théâtre d’exécutions puis d’inhumations de résistants. Cela pousse des associations de résistants et de déportés à demander une célébration particulière de la victoire. En 1953, l’assemblée de la quatrième République vote une loi rendant le 8 mai férié. La date s’impose alors comme référence de la guerre. Quand il met en place la cinquième République, le général de Gaulle décide que le 8 mai ne sera plus férié mais commémoré le deuxième dimanche du mois au grand dam des anciens combattants. Pour le vingtième anniversaire de la victoire, le gouvernement Pompidou rétablit exceptionnellement le caractère férié pour cette seule occasion puis en 1968, la célébration est programmée en fin de journée.
Le rapprochement franco-allemand sous l’égide de Valéry Giscard d’Estaing et d’Helmut Schmidt conduit le président français à ne pas commémorer le trentième anniversaire, à proposer une journée de l’Europe et à imaginer le transfert des commémorations nationales sur le seul onze novembre. Cette décision provoque de vives réactions. Le président socialiste en 1981 fait voter le 23 septembre une loi qui fait du 8 mai un jour commémoratif férié, ce qu’il est toujours depuis.
Le 8 mai 1995, cinquantième anniversaire de la victoire, le président Mitterrand est accompagné du nouvel élu, Jacques Chirac, alors que la passation de pouvoir n’a pas encore eu lieu. Mais ce jour, François Mitterrand rejoint Helmut Kohl dans une commémoration franco-allemande. La dimension européenne de la commémoration devient primordiale au nom de la victoire sur la barbarie, de la libération des peuples européens opprimés et de la construction d’un continent uni. Comme pour le onze novembre, le souci d’associer l’ensemble des morts de la guerre dans la démarche commémorative l’emporte désormais. Ils furent tous combattants d’une même guerre. Le 8 mai est leur journée, celle d’un conflit fondateur. Les soldats allemands ne furent-ils pas d’une certaine façon victimes eux aussi d’une barbarie qui les a conduits à la mort ? Cette approche n’a de sens que si le 8 mai se transforme en jour privilégié d’une autre construction. Il fallut faire tomber les ambitions nationales, mettre un terme au temps de l’Etat-nation dominant pour faire naître un nouveau continent, dont l’extinction du fait guerrier devint l’objectif des Etats unis. Lors de la célébration à Paris du 8 mai en 2005, l’hymne européen domina et les drapeaux allemands flottèrent aux côtés d’autres drapeaux plus communément admis en ce jour.
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